D'Ischia à Oran
avec Jean Mattera

Compte rendu de la soirée

Le 19ème siècle a vu de nombreux migrants européens quitter leur sol natal, contraints par des raisons économiques, climatiques ou politiques, mais bien souvent pour simplement espérer trouver ailleurs une vie meilleure pour leur famille.

Certains sont partis vers les Amériques, d'autres ont traversé la Méditerranée pour s'installer dans cette terre française d'Algérie que l'on disait pleine de ressources.
Ils venaient d'Italie, d'Espagne, de Malte ou de France.

Un premier temps apportera un éclairage sur les conditions dans lesquelles ces migrants ont tout abandonné et se sont construit une nouvelle vie sur une nouvelle terre, à partir de l'histoire de 2 familles, l'une italienne originaire de la petite île d'Ischia dans la baie de Naples, l'autre espagnole originaire de Barcelone et de la petite ville de Jijona, dans le sud du pays.

Ensuite, c'est le mode de vie en Oranie qui sera évoqué, dans lequel s'entrecroisaient les cultures européennes et algériennes, illustré d'anecdotes familiales.

Jean Mattera, romancier, issu de ces branches européennes installées outre-méditerranée, évoquera ces thèmes avec la participation de ses frères et de soeur Anne-Marie Briand.

Le vendredi 24 février 2023 à 20h30 à l'annexe municipale, place des Droits de l'Homme à Vanosc.
Entrée gratuite.

Robert, Alfred et Jean Mattera

"CE N'EST PLUS NOTRE PAYS, MAIS C'EST TOUJOURS CHEZ NOUS…"

Soirée de La Vanaude instructive et émouvante "d'Ischia à Oran la multicolore".
Accompagné de ses frères Robert, le vanoscois, et Alfred ainsi que d'Anne-Marie Briand, Jean Mattera a d'abord dressé un résumé de l'histoire dense et complexe de l'Algérie: des berbères aux romains, des kabyles aux arabes, des ottomans aux espagnols jusqu'aux français débarqués en 1830 à Sidi Ferruch.
S'en est suivi plus tard, en 1871, l'arrivée de communards, indésirables dans l'hexagone, en 1872 des alsaciens qui n'ont pas voulu devenir allemands après la guerre de 70-71, et en 1880 des languedociens dont les vignes avaient été détruites par le phylloxéra.
Les conflits pour l'unité du territoire en Italie ont également engendré une immigration massive , notamment des napolitains, vers l'Algérie.

Giuseppe Mattera et Angela Maria Conte arrivent à Mers-El-Kébir en 1876

C'est dans cette période que Giuseppe et Angela Mattera quittent leur île natale, Ischia, sur une modeste embarcation et arrivent à Mers-El-Kébir où Antoine, le grand-père de Jean, Robert et Alfred, naît en 1885.
De nombreuses personnes migreront du Levantin espagnol, comme les aïeux maternels de la famille Mattera, José et Ligoria Espi, arrivés à Oran en 1887.
Les mahonnais, de l'archipel des Baléares, où règne la misère, opteront eux aussi pour Oran.

Jean Mattera a ensuite abordé la colonisation planifiée.
De 1831 à 1880 s'est d'abord déroulé le peuplement et l'aménagement des plaines côtières et de 1850 à 1900 la colonisation des hautes plaines.
Il a illustré son propos par différentes affiches émises par les autorités françaises : des avis aux ouvriers, des ventes de lots de terrains mais aussi des expropriations.
Il est résulté le déplacement de la population autochtone vers des terres peu voire pas cultivables, sans doute une source de difficultés ultérieures.
L'origine multicolore des nouveaux habitants n'a pas empêché que se constitue un ciment de valeurs partagées et une vraie reconnaissance du ventre et du cœur à cette terre d'accueil.
D'importants travaux ont été engagés, asséchement de marais, irrigation, constructions diverses…
Les paysans, pêcheurs et ouvriers ont apporté leurs compétences et leur énergie.
L'agriculture maraîchère, la culture du tabac, l'arboriculture, la vigne et la pêche se sont considérablement développées.

Dans ce melting pot, des familles comme la famille Mattera ou celle d'Anne-Marie Briand se sont parfaitement intégrées à cette nouvelle vie où régnaient respect, convivialité et fraternité.
Il en est découlé l'émergence d'une identité spécifique.
La politique d'intégration de cette nouvelle population provenant de différents coins d'Europe a facilité l'obtention de la nationalité française.

Alors que la France vivait au début du XXème siècle à l'heure de la séparation de l'église et de l'état, des églises étaient construites en terre oranaise.

Le régime économique était aussi particulier.
Il convenait que les produits de l'Algérie ne concurrencent pas ceux de métropole. Des adaptations ont permis à certaines marques de connaître un vrai succès.
Jean Mattera n'a pas manqué de souligner, qu'outre Albert Camus, de nombreuses personnalités nées en terre algérienne ont marqué leur époque dans le monde de la culture, du journalisme, du spectacle ou du sport.

Sont ensuite survenus les événements, cette guerre qui ne disait pas son nom et le départ, pas facile de cette terre natale.
L'adaptation à la vie en métropole ne fut pas aisée.

La famille Materra a eu l'occasion de retourner à Oran.
L'accueil fut chaleureux et le plaisir de cette visite fut immense.
Comme l'ont dit les intervenants "Ce n'est plus notre pays, mais c'est toujours chez nous."
Une manière de rappeler qu'on n'oublie jamais son enfance, surtout si elle a été heureuse comme ce fut le cas pour eux.

Les trois frères ont, en conclusion, avec la gentillesse qui les caractérise, offert au public le verre de l'amitié et de succulentes pâtisseries maisons dont les fameux mantecaos.

Yves Boulanger

 

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